Délit de consultation de sites terroristes : l'avis du CNNum

A la suite de la tragédie de Toulouse et Montauban, le Président de la République, dans une déclaration en date du 22 mars 2012, a indiqué que « Désormais toute personne qui consultera de manière habituelle des sites internet qui font l'apologie du terrorisme ou qui appellent à la haine et à la violence, sera punie pénalement ».

A ce titre, il rappelait l’importance d’une action résolue en matière de prévention et répression du terrorisme, dans le respect des libertés publiques, et souhaitait que notre droit pénal s’adapte pour permettre à l’Etat de combattre plus efficacement et préventivement les phénomènes de radicalisation et d’endoctrinement qui peuvent en être à l’origine.

A la suite de cette annonce, le Conseil national du numérique (CNNum) avait sollicité, par courrier en date du 23 mars 2012, le Président de la République afin qu’il soit saisi rapidement, et avant tout débat parlementaire, du texte de la mesure afin d’apprécier le nécessaire équilibre entre les divers droits et libertés en présence. En effet, le CNNum estime que la lutte contre les contenus et les comportements illicites diffusés et propagés sur l’internet demeure un objectif important. La participation des acteurs de l’internet à cette lutte s’inscrit notamment dans la démarche de coresponsabilité prônée lors du eG8 Forum et reprise dans la déclaration finale du G8 des 26 et 27 mai 2011.

Pour autant, le CNNum considère que cette participation des acteurs de l’internet à la lutte contre toutes les formes de cybercriminalité doit s’inscrire et être conciliée avec un certain nombre de principes comme ceux de proportionnalité ou de liberté d’expression et de communication.

Le CNNum relevait notamment que l’usage par certaines professions (journalistes, chercheurs universitaires, etc.) de ces sites et leur consultation régulière pourraient soulever des difficultés légitimes lors de la mise en oeuvre de cette infraction.

Par courrier en date du 2 avril 2012, le Premier ministre a saisi le Conseil national du numérique de l’avant-projet de loi renforçant la prévention et la répression du terrorisme et en particulier, sur le projet de délit de consultation habituelle de sites terroristes.

Au regard du délai imparti de 72 heures, le CNNum a élaboré des préconisations sur les mesures proposées, sans se prononcer sur son opportunité qui, en l’espèce relève du débat politique et parlementaire.

Le CNNum se réserve ainsi la possibilité de poursuivre cette réflexion dans l’attente de l’ouverture des débats parlementaires en s’appuyant sur l’expertise des services de police et de gendarmerie spécialisés et au travers de la consultation d’associations et d’acteurs de la société civile intéressés.

Cette réflexion pourra le cas échéant donner lieu à un avis complémentaire, rendu par le CNNum postérieurement au dépôt du projet de loi sur le bureau d’une des assemblées parlementaires. Suite à l'avis du CNNum, le Ministre de la Justice a présenté en Conseil ministre ce 11 avril 2012 le projet de loi renforçant la prévention et la répression du terrorisme.

Les recommandations du CNNum tendant à mieux préciser la nature des contenus visités ont été reprises, le projet de loi définissant plus précisément les contenus faisant l'apologie des actes de terrorisme. De même, le texte prévoit une exception, souhaitée par le CNNum, au profit des journalistes et chercheurs universitaires qui peuvent, légitimement, souhaiter accéder régulièrement à ces contenus.

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