L’IA se prête-t-elle au jeu ?

Bonjour, nous sommes le vendredi 5 juillet 2024. Cette semaine, nous nous intéressons à la manière dont le jeu peut être facteur de convivialité et de libération de la parole sur notre relation aux nouvelles technologies. Bonne lecture !

💡 La question de la semaine : l’IA se prête-t-elle au jeu ?

Le jeu peut ouvrir sur une appropriation des enjeux technologiques. C’est ce que nous montre l’expérience de Valérie Plier et Alix Mansueto, du ministère des Armées, que nous avons eu le plaisir d’accueillir lors d’un premier café animation (lire l’entretien, synthèse à venir). En plus d’animer des temps d’échanges sur l’IA depuis un an, elles ont ainsi créé « de nombreux formats pédagogiques et ludiques : escape games, serious games, jeux de plateau, quiz... » Autant de supports qui leur permettent d’intervenir auprès de publics scolaires, de sensibiliser plus largement et aussi « d'encourager les filles à s’engager dans des filières numériques encore très masculines et à se questionner sur les biais de genre », comme ce fut le cas avec un escape game qu’elles ont organisé le 8 mars à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes. 

Partout en France, de nombreuses associations et structures de médiation utilisent le jeu pour permettre à un public parfois hésitant de faire le premier pas et d’investir un champ aussi complexe au premier abord que l’intelligence artificielle. Dans un autre entretien à retrouver sur notre site internet, nous revenons avec Margaux Levisalles et Valentin Hacault de l’association Latitudes sur la Bataille de l’IA, un jeu de cartes créé en partenariat avec Data For Good. Après un premier temps en mouvement où les participants à la Bataille de l’IA sont invités à replacer chronologiquement des faits marquants de l’histoire de l’IA, ils débattent ensuite en groupe autour de controverses environnementales, sociétales, des biais, de la créativité et de la fiabilité des outils : « Chat GPT va-t-il tuer notre imagination ? » ; « générer une œuvre avec l’IA, est-ce de l’art ou du copier-coller ? » Autant d’interrogations pratiques, parfois polémiques, permettant d’étayer des réflexions et de comprendre à travers un échange collectif l’étendue des questions sociétales soulevées quotidiennement par le développement de ces technologies. 

🗓️ Inscrivez-vous ici au prochain café Animation du 11 juillet (à partir de 13h30) pour découvrir la Bataille de l’IA et poser toutes vos questions à Valentin !

Les nombreux déplacements effectués à travers la démarche Itinéraires numériques ont par ailleurs permis d’expérimenter ces moments conviviaux au sein de médiathèques, tiers-lieux, cafés associatifs… Parmi beaucoup d’autres, des jeux sont mis au point pour différents publics, parmi lesquels le jeu sous licence creative commons st[IA]mmtisch initié par la Délégation régionale académique au numérique éducatif (DRANE) de Strasbourg, Le jeu de l’IA, un jeu d’énigme à destination des collégiens conçu par la délégation régionale au numérique pour l’éducation de l’académie de Bourgogne-Franche-Comté, ou encore le jeu des 60 cartes Numérique Éthique, mis au point par l’association Métacartes et développé en partenariat avec Framasoft. 

Au-delà du jeu, la convivialité. Si le jeu peut ouvrir sur un échange sur le numérique, il existe autant de formats ludiques et conviviaux qui nous permettent d’échanger, de discuter et de débattre sur notre relation à l’intelligence artificielle. À travers par exemple les ateliers d’écriture Mikrodystopies imaginés par François Houste, c’est la technologie qui est prise comme terrain de jeu pour développer notre curiosité et notre imaginaire. Dans ce format d’écriture court sous contraintes, inspiré par les limites de caractères du réseau social Twitter et dont le mode d’emploi est disponible en libre accès, on pense un scénario et on ajoute du suspens pour questionner la place qu’occupe la technologie dans notre quotidien. Par ailleurs, alors que nos interactions avec les IA génératives sont cadrées par le prompt (text-to-text, text-to-image, image-to-image... ), le format des prompt battle imaginé par les Allemands Florian A. Schmidt et Sebastian Schmieg, et qui consiste en une compétition où les participants doivent reproduire une image de la façon la plus fidèle possible grâce à un prompt textuel, permet de questionner l’ingénierie du prompt, c’est-à-dire notre capacité à mobiliser un ensemble de savoirs pour obtenir les résultats les plus pertinents.

Cette volonté de sensibiliser un large public grâce à des jeux ou des formats d’animation ludiques et conviviaux se déploie partout en France autour d’une multitude de personnes, réunies ou non en collectifs, au sein de structures publiques, privées ou associatives. Ces acteurs essentiels nous accompagnent dans la compréhension du numérique et de ses impacts sur notre façon de travailler, d’apprendre ou encore d’échanger entre nous.

Vous connaissez d’autres formats ludiques pour parler d’IA ? N’hésitez pas à nous les partager en nous écrivant à cafeia@cnnumerique.fr ! Nous vous les repartagerons prochainement.

🎨 Des Cafés animations pour se rencontrer

• Le 11 juillet, l’association Latitudes nous présentera la Bataille de l’IA.
• Le 18 juillet, Nicolas Roussel, directeur du centre Inria Bordeaux, reviendra notamment sur un premier Café IA organisé le 20 juin à Bordeaux avec Inria et Bordeaux Métropole.

🗓️ Inscrivez-vous ici pour participer à ces deux échanges. De nombreux autres sont prévus, nous vous partagerons les dates de ces espaces de dialogues très prochainement !

🗺️ Café IA prend forme près de chez vous

• Le 3 juillet, au sein de l’Université Populaire du Numérique de Damgan, une association morbihannaise visant la promotion d’une éducation numérique dans tous les domaines et pour tous les âges, Gilles Babinet animait un Café IA : une discussion ouverte sur notre relation à l’intelligence artificielle réunissant une vingtaine de personnes.
• Le 11 juillet, l’association Kocoya ThinkLab organise un Café IA au sein des Arches Citoyennes à Paris (inscriptions).

🔎 La veille du Conseil

L’IA s’invite dans le quotidien des DRH. L’université de l’Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH) s’est tenue les 21 et 22 juin derniers autour du thème de l’intelligence artificielle. Comme le souligne un article de HelloWorkplace, l’introduction de l’IA au travail peut poser des questionnements éthiques et pratiques : protection des données confidentielles, évolution des métiers, prise en compte des biais algorithmiques… Autant de changements qui nécessitent par exemple la construction de comités d’éthique, de chartes réalisées collectivement et enfin d’un véritable dialogue social technologique, un sujet sur lequel le Conseil s’est largement penché ces dernières années.

Vers une conception participative de l’IA ? La lettre d’information Dans les algorithmes d’Hubert Guillaud s’intéresse dans son édition du 25 juin aux possibilités de débat démocratique autour de l’IA. À partir d’un article rendant compte des tensions autour de la participation citoyenne, la lettre revient sur différentes initiatives relatives à la conception participative des technologies dans le monde, pour cerner la difficulté à dialoguer entre les concepteurs et les producteurs de systèmes et leurs utilisateurs. Parmi elles figurent les exercices démocratiques menés à Montpellier ou à Rennes, dont nous vous parlions récemment dans Cénum. Si les échanges citoyens existent, ceux-ci restent néanmoins souvent généralistes et sans que leurs conclusions puissent imprégner les processus de conception des techniques. Ce qui exige alors pour Hubert Guillaud de « poser la question du pouvoir et donc du contre-pouvoir » et d’organiser « la confrontation des intérêts divergents » en référence à l’ouvrage de Manon Loisel et Nicolas Rio Pour en finir avec la démocratie participative. Et si on amenait Café IA jusque-là ?

L’IA générative au service de la démocratie ? François Yvon, directeur de recherche à l’Institut des systèmes intelligents et de robotique, présente sur le site de Sorbonne Université le projet « Communs Démocratiques » par la plateforme Make.org, Sciences Po, Sorbonne Université et le CNRS. Un projet qui vise à utiliser les IA génératives pour renforcer les processus démocratiques : traduction de contenus allophones, résumé de contributions, modération des contenus inappropriés, répondre aux questions des participants… Les outils d’IA peuvent faciliter les initiatives de démocratie contributive et participative en ligne, à condition qu’ils soient encadrés et que leurs objectifs soient clairement définis. C’est tout l’enjeu de ce projet qui travaille à la création de solutions open source de modération, d’assistance à l'expression des opinions et de traduction multilingue.

47 % des Français s’informent quotidiennement sur les réseaux sociaux. Le pôle numérique commun de l’Arcep et de l’Arcom publie la quatrième édition de leur référentiel commun des usages numériques. Publié annuellement, ce référentiel met à disposition des données de référence sur les usages du numérique en France. La tendance générale observée pour l’année 2023 est une augmentation du temps passé sur les sites et applications internet, avec une moyenne de 2h24 par jour, soit 6 minutes de plus par rapport à 2022 et 50 minutes de plus en 5 ans. Parmi les sites les plus consultés, les réseaux sociaux confirment leur influence, devenant par ailleurs un point d’accès quotidien à l’information pour 47 % des Français. Interrogés sur leurs motivations, les répondants pointent le fait d’y trouver des informations qu’ils ne trouvent pas ailleurs, les formats qui sont proposés sur les réseaux sociaux, l’offre singulière et adaptée à leurs intérêts ou encore la liberté d’expression de tous et le temps réel. En parallèle, l’étude fait ressortir une diversification des usages, avec notamment l’intelligence artificielle qui est utilisée par 20 % des Français. Néanmoins, les 18-24 ans sont surreprésentés dans les usagers de l’IA, et encore deux tiers de la population déclarent ne pas savoir ce qu’est exactement l’IA ou n’en avoir jamais entendu parler.

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🏃 En bref... Le reste de l’actualité du Conseil en 1 minute chrono !

« Les travaux de recherche sur le numérique et les prises de conscience qu’ils permettent peuvent contribuer à transformer l’orientation des développements industriels. Il est essentiel de pouvoir renforcer les liens entre la recherche et la société civile, ce qu’une émission comme le Meilleur des Mondes permettait. » À l’occasion de la dernière édition de l’émission de François Saltiel sur France Culture, Anne Alombert a rendu hommage à ce lieu de ralliement d'une pensée plurielle sur le numérique ✦ « Il est important de distinguer un usage socialisant d'un usage désocialisant des écrans, et d'y éduquer les enfants à chaque tranche d'âge. » Dans Le Figaro, Serge Tisseron revient sur le besoin d’instaurer au sein des foyers un dialogue apaisé dans nos relations aux écrans, rappelant l’importance de se méfier de l’utilisation du terme addiction dans notre relation aux écrans. ✦ L’IA générative : nouvelle porte d’entrée pour accéder aux contenus sur internet. En marge de la présentation par l’Arcep du rapport sur l’état de l’internet en France le 4 juillet, Frédéric Alexandre, Jean Cattan et Célia Zolynski participaient à une table ronde sur l’ouverture d’internet à l’heure de l’IA générative. Leur contribution au rapport sur l’état de l’Internet « IA : notre mise en capacité commence par la collecte de données ! » est à lire ici. ✦ IA et Etats : inverser le rapport de force. Ne manquez pas l’intervention de Tatiana Jama aux Rencontres économiques d'Aix-en-Provence à 18h ce samedi 6 juillet aux côtés notamment de Jacques Attali à suivre en ligne en direct depuis le site des rencontres.

Merci pour votre lecture et à la semaine prochaine !

👋 Avant de partir 

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Cette lettre d’information a été préparée par Joséphine Hurstel, Louis Magnes et Gabriel Ertlé, illustrée par Magali Jacquemet et réalisée avec le soutien de Jean-Baptiste Manenti, Zora Decoust et Jean Cattan.