Régulation du numérique : quelle place pour la société civile et la recherche ?

Le 20 juin dernier, le Conseil national du numérique organisait, en partenariat avec l’Arcom et avec la participation de la Dilcrah, une conférence sur le rôle de la société civile et de la recherche dans la régulation du numérique.

Visuel journée Arcom et CNNum

 

Dans la perspective de l’entrée en vigueur du règlement européen sur les services numériques (DSA) le 25 août prochain, le Conseil national du numérique et l’Arcom ont organisé une matinée de débats autour des opportunités offertes par l’ouverture de la régulation à la parole de la société civile et de la recherche européenne. Financement de la société civile et de la recherche, indépendance, mutualisation, coopération... autant de sujets abordés qui seront décisifs pour apaiser l’espace numérique. L’événement a réuni plus de 70 acteurs de tous horizons : autorités, associations de signalement, plateformes et chercheurs.

Programme de la journée

Alors que l’Europe dessine une nouvelle voie dans la régulation du numérique, il est indispensable d’inclure l’expérience de la société civile et de la recherche à ce nouveau chapitre. Roch-Olivier Maistre, président de l’Arcom et Benoît Loutrel, membre du collège, ont rappelé les engagements de l’institution pour garantir cette ouverture à la recherche et à la société civile, dans la continuité de leur futur rôle de coordinateur des services numériques. Un enjeu également rappelé par Gilles Babinet, coprésident du Conseil : une régulation ouverte du numérique représente avant tout un enjeu démocratique et la condition même de sa réussite. 

Table ronde 1 : Le rôle des associations pour bâtir un espace numérique apaisé 
Les associations sont en première ligne dans la lutte contre la haine et agissent au quotidien auprès des victimes. Lors de la 1ère table ronde, Justine Atlan (e-enfance), Jean-Christophe Le Toquin (Point de contact) et Rachel-Flore Pardo (Stop Fisha) ont échangé sur le rôle de signaleurs de confiance inscrit dans le DSA, qui vient expressément consacrer le statut central des associations. Leur mission ? Soumettre des signalements de contenus manifestement illicites ou contraires au règlement aux opérateurs de plateformes en ligne. Les enjeux ? La compréhension du texte par l’ensemble des acteurs, la notoriété de ce rôle et l’accompagnement nécessaire et le financement. En effet, si le DSA renforce le statut des associations, plusieurs participants ont rappelé leur fragile équilibre financier, regrettant que le texte européen ne consacre pas que les plateformes financent les associations qui participent au contrôle de contenu en ligne.

Table ronde 2 : L’enrichissement de la régulation numérique européenne et nationale par le monde académique 
Les chercheurs permettent la compréhension des dynamiques qui se jouent sur les réseaux sociaux ; ils éclairent en cela le débat public et nourrissent la régulation. La régulation doit tenir compte de leur voix et surtout leur assurer de mener comme il se doit leurs recherches. Le risque sinon ? Être éloigné des réalités, ne pas répondre adéquatement aux besoins des utilisateurs, voire ne pas saisir les enjeux à l'œuvre. 

À ce sujet, une table ronde animée par Benoît Loutrel réunissait Frédérique Douzet, professeure des Universités à l'Institut Français de Géopolitique de l'Université Paris 8, directrice de son laboratoire l'IFG Lab et du projet Géopolitique de la Datasphère (GEODE), Oana Goga (CNRS) et Suzanne Vergnolle (Cnam). Pour Suzanne Vergnolle, maître de conférences en droit du numérique au Cnam, le règlement sur les services numériques est l’un des textes qui introduit le plus de dispositions relatives à la transparence des plateformes. À ce titre, l’article 40 du DSA mettant en place un mécanisme ouvrant aux chercheurs l'accès aux données des grandes plateformes offre une perspective positive mais dont la mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance renforcée, comme le rappelle Frédérick Douzet. L’article 30 prévoit quant à lui la création par les plateformes d’une librairie recensant les publicités diffusées sur leurs espaces. Une disposition accueillie par Oana Goga, chercheure en informatique au CNRS, qui facilitera le travail des chercheurs dans la modélisation des flux de désinformation.
 

Visuel Journée Arcom et CNNum

Pour conclure, Sophie Elizéon, déléguée interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah) a rappelé son soutien à la démarche et les engagements de la Dilcrah dans cette optique.

Un engagement collectif dynamique à encourager
Le même jour, le Conseil assistait au premier colloque autour des manipulations de l'information en ligne autour du monde de la recherche. Stéphane Bouillon, secrétaire général du Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale y a rappelé le rôle de la recherche dans la lutte contre la désinformation, affirmant que « nous avons besoin d’experts formés pour rétablir les faits et lutter contre les acteurs pour qui la vérité est soluble dans les buts à atteindre. ».

Autant d’enjeux qui font écho à la journée organisée par le Conseil le 13 octobre 2021 « démocratie et fait numérique, de l'information à l'action », organisée en partenariat avec la Direction interministérielle de la transformation publique (DITP) et Numérique en commun(s). À cette occasion, 150 acteurs publics et chercheurs étaient réunis pour réfléchir de manière collective au besoin de rassembler acteurs publics, société civile et monde de la recherche. Un message à retenir de cette journée ? Le besoin et l’envie partagés par tous de plus de coopération et de partage d’informations et de données, pour plus d’efficacité et de pertinence.

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Événement

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