Éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle. Échange avec la DGCS

Mieux comprendre le fonctionnement des Espaces vie affective, relationnelle et sexuelle et l’accompagnement en ligne sur ces sujets, c’est tout l’objet de l’entretien mené avec Frédérique Ast et Emmanuelle Galy de la Direction générale de la cohésion sociale.

Frédérique Ast et Emmanuelle Galy travaillent au sein du Service des droits des femmes et de l'égalité entre les femmes et les hommes (SDFE) rattaché à la Direction générale de la cohésion sociale. Son ministère de tutelle est le ministère chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Elles y sont respectivement adjointe à la cheffe du bureau chargé de l’égalité femmes hommes dans la vie personnelle et sociale et chargée de mission santé des femmes et éducation à la vie affective et sexuelle.

À quoi correspondent les Espaces vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS) ? Comment sont-ils organisés ?

Les EVARS sont des lieux non médicalisés et en grande partie gratuits, d’accueil, d’information, d’écoute, de sensibilisation et de prévention. Ces lieux, initialement nommés « établissements d'information, de consultation ou de conseil familial » (EICCF), ont été créés par la loi Neuwirth légalisant la contraception (1967) et mis en place au début des années 70 (décret n° 72-318 du 24 avril 1972). A côté des centres d’éducation familiale (désormais appelés centres de santé sexuelle), les EICFF sont conçus comme des établissements non-médicalisés permettant d’échanger sur l’ensemble des sujets touchant à la vie affective et sexuelle.

Aujourd’hui, le Service des droits des femmes et de l'égalité entre les femmes et les hommes (SDFE) de la DGCS pilote au niveau national le réseau de 150 structures d’EVARS réparties sur l’ensemble du territoire français, métropolitain et ultramarin avec l’appui des directions régionales dédiées aux droits des femmes, elles-mêmes en lien avec les déléguées et délégués départementaux qui suivent les structures de leur département.

Depuis 2022 et sous notre pilotage, le Planning familial assure la coordination des EVARS à des fins de mutualisation et de visibilité, notamment sur les réseaux sociaux. D’autres associations portent également des EVARS, les plus importantes étant la Fédération nationale des centres d'information sur les droits des femmes et des familles, la Fédération nationale des couples et familles, la Fédération nationale des écoles des parents et des éducateurs, l'Association française des centres de conseil conjugal ou encore l'Union nationale des associations familiales.

Quelles sont les missions des Espaces vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS) ?

En 2018, une réforme importante des EICCF est menée. Ainsi, les EICCF sont notamment désignées comme des Espaces vie affective, relationnelle et sexuelle à des fins de lisibilité et leurs missions sont rendues obligatoires :

  • Informer la population sur les droits en matière de vie affective, relationnelle et sexuelle, ce qui recouvre :
    • L’information sur les droits tenant notamment à la contraception, l'interruption volontaire de grossesse (IVG) et à la prévention des infections sexuellement transmissibles (IST) ;
    • La conduite d'entretiens préalables à l'interruption volontaire de grossesse (non médicaux) et l’accompagnement des femmes envisageant de recourir ou ayant recouru à une IVG ;
    • La proposition d’une éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, ou l’éducation à la sexualité, en intervenant dans des établissements scolaires et universitaires mais aussi dans certains cas au sein de centres d’hébergement et de réinsertion sociale ou encore dans des EHPAD. En effet, les personnes qui travaillent au sein des EVARS traitent de ces sujets quotidiennement et y sont largement formées, elles savent écouter, accueillir et accompagner une parole sur des sujets tels que les violences sexistes et sexuelles ;
  • Accompagner les bénéficiaires dans leur vie affective, relationnelle et sexuelle, en cas de crise conjugale ou familiale, ou pour un accompagnement autour du désir ou non d’avoir un enfant, ou du souhait d’adoption ou encore pour un accompagnement en cas de dérives sectaires ou radicales ou d’emprise mentale ;

Quel est l’impact de ces structures et plus largement des actions de la DGCS en matière d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle ?

En 2023, nous avons élaboré une synthèse des remontées d’indicateurs des EVARS concernant l’année 2022 :

  • Accueil : Parmi les plus de 160 000 personnes reçues dans les murs ou par téléphone, 83 % sont des femmes et 61 % ont moins de 26 ans (24 % moins de 18 ans et 37 % entre 18 et 25 ans).
  • Interventions : Les personnes qui travaillent au sein de ces structures ont aussi réalisé près de 14 000 interventions dans des établissements scolaires et d’enseignement supérieur. Cela représente près de 175 000 élèves et étudiants (dont environ 160 000 dont le niveau a été précisé : 92 000 collégiens, 60 000 lycéens ou encore 8 000 étudiants). 
  • Par ailleurs, plus de 7 000 interventions ont été effectuées dans d’autres structures : en établissements recevant des personnes en situation de handicap (1 717) ; des personnes âgées (51) ; ou dans d’autres structures, par exemple en centres d’hébergement et de réinsertion sociale, au sein de missions locales ou encore dans des établissements pénitentiaires (5 546).

Nous avons par ailleurs lancé une expérimentation dans certains territoires pour sensibiliser les publics scolaires sur la santé menstruelle et sexuelle et notamment en matière de précarité menstruelle se situant aux confins de deux tabous : la pauvreté et les menstruations. La première expérimentation a eu lieu dans les collèges et lycées de Lille, il s’agissait de distribuer gratuitement des protections périodiques et d’accompagner ces distributions de séances d’éducation à la sexualité. Cette expérimentation a été par la suite étendue dans d’autres départements comme la Seine-Saint-Denis, les Ardennes, les Alpes-Maritimes, les Landes, la Réunion ou encore à Mayotte. Les départements de l’Allier, de l’Ain, de l’Aveyron et d’Indre-et-Loire vont également mettre en place ce dispositif. Lors de l’année scolaire 2022-2023, les expérimentations ont permis de toucher 338 établissements scolaires, principalement des collèges, plus de 30 000 élèves, filles et garçons. 194 distributeurs de protections périodiques ont été installés, plus de 430 000 protections périodiques jetables et près de 4 000 protections périodiques lavables (coupes, serviettes lavables et culottes menstruelles) ont été distribuées.

Comment les structures qui font de l’éducation à la vie affective relationnelle et sexuelle s’approprient-elles l’espace numérique ?

La DGCS finance le numéro vert national, unique, anonyme et gratuit du Planning familial intitulé Sexualités, Contraception, IVG (0 800 08 11 11). Depuis 2023, un tchat gratuit est disponible sur le site correspondant qui indique la possibilité d’entrer “en contact instantané avec une personne compétente [des conseillères conjugales et familiales] qui pourra répondre à vos questionnements, vous informer et vous orienter.” Nous finançons aussi le tchat Comment on s’aime porté par l’association En avant toutes sur les sujets de violences, d’identité et de genre ou encore de sexualité.

De nombreux sites existent sur le sujet de l’éducation à la sexualité. Notre réseau régional et départemental nous a fait remonter trois exemples :

  1. Porté par le Planning familial Bouches-du-Rhône et également présent sur Facebook et Instagram, le site d’accompagnement Parlons sexualité est dédié aux 15-25 ans. Il a été construit en collaboration avec 19 acteurs de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Les articles hébergés émanent à la fois de questions ayant été posées par des élèves lors d’interventions en établissements scolaires et d’autres reçues par mail. Une carte interactive référence par ailleurs les professionnels de la région.
  2. Porté par le Planning familial Nouvelle-Aquitaine, co-financé par la Région, l’agence régionale de santé (ARS) et la direction régionale aux droits des femmes et à l’égalité entre les femmes et les hommes (DRDFE), le site Ton plan à toi diffuse de l’information sur les droits sexuels à destination de personnes âgées de 15 à 30 ans, relayée sur Facebook et Instagram. Un référencement des professionnels de la région sont également disponibles.
  3. Soutenue par notre directrice régionale à Mayotte, l’application Chababi Jouwa a été créée en 2021 pour briser le tabou des sexualités sur l’île. L’objectif de cette application est en premier lieu de rompre avec le tabou qui existe autour des questions de sexualité sur le territoire de Mayotte. Elle fournit de l’information sur les lieux d’accompagnement et les moyens de contraception. Une fois l’application téléchargée, il est possible d’accéder aux contenus hors connexion, ce qui permet aux personnes précaires d’y accéder même en l’absence de forfait internet ou wifi, sachant qu’à Mayotte, 77 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Les contenus proviennent sinon de la rubrique Questions d’ados de Santé Publique France. En 2022-2023, un QR code présent dans les agendas scolaires financés par l’ARS et sur les préservatifs distribués par la Croix-Rouge permettait d’accéder directement à l’application.

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