« Partout où un lien technologique s’établit, nous devons redoubler de liens sociaux. »
Dans Chut ! Magazine, Jean Cattan appelle à faire des questions technologiques des questions collectives et à lancer des dynamiques démocratiques de proximité, notamment autour de la question du recours à l'IA dans le cadre éducatif. Une manière de repenser notre rapport à l'éducation.
Imaginez un parent découvrant dans le carnet de correspondance de son enfant un QR code à flasher menant, sans autre forme d’explication, à une application d’apprentissage différencié, assistée par intelligence artificielle. L’application propose une série de jeux interactifs où l’enfant clique sur des objets en fonction des instructions vocales données par une voix synthétique. Chaque étape est sanctionnée par une taupe surgissant d’une coupe, offrant une gratification immédiate à l’enfant. Tous les niveaux franchis, l’enfant accède à une histoire lue par une voix machinique. Que faire alors ?
Sans qu'il s'agisse d’une critique générale de l’usage du numérique à l’école, ce type de situation peut avoir pour effet de plonger tout parent (trop ?) attentionné dans un abîme de questions existentielles. Dans quelle condition dois-je accompagner mon enfant ? Dois-je le laisser accéder à un appareil de la maison, le cas échéant seul ? Dois-je l’aider ou ne pas l’aider ? Quelles conséquences auront ses réponses sur son parcours pédagogique à l’école ? Sur son évaluation ? Sur son futur ? Les questions d’un parent angoissé pourront être infinies, alors que les cadres où les poser risquent de se faire rares. Si bien que les usages dépendront des manières de faire de chacun. Toutes les familles auxquelles ce genre d’application sera proposée n’auront probablement pas du tout la même expérience. Ainsi, l’apprentissage différencié va bien au-delà du seul parcours d’apprentissage de la lecture pour chaque élève. Il touche la relation à l’école dans son entièreté.