Ouvrir nos imaginaires
Mais aussi : organisez votre atelier Mikrodystopies ✦ Seuls 2% des membres de conseil d'administration se sentent capables de superviser l'IA générative ✦ Agents dopés à l’IA : assistants à notre service ou ubérisation au carré ? ✦ Café IA à Londres !
Bonjour, nous sommes le vendredi 25 octobre 2024. Faute d’avoir pu vous faire parvenir votre numéro de Cénum vendredi dernier, nous vous proposons aujourd'hui une édition augmentée ! Cette semaine, explorons comment ouvrir nos imaginaires pour repenser notre rapport à la technologie et redéfinir notre vision de l'avenir. Bonne lecture !
Ecrire pour l’« à-venir » La semaine dernière, Elon Musk faisait l’annonce en grande pompe de son robot humanoïde prétendument autonome Optimus, laissant flotter un air de déjà-vu qui n’aura échappé à personne. Le robot n’est en effet pas sans rappeler une vision hollywoodienne déjà apparue notamment dans I, Robot (film de science-fiction sorti en 2004 où une IA arrive à détourner des robots autonomes de leur objectif pour se rebeller contre l'humanité). Le réalisateur s’en est d’ailleurs amusé sur Twitter/X. Les producteurs de Blade Runner 2049 ont quant à eux décidé de poursuivre Elon Musk en justice.
À travers cet évènement, nous constatons combien l’appropriation des imaginaires fictifs par les entreprises de la Silicon Valley se mue en une appropriation de nos futurs. Dans son dernier livre, Vallée du silicium (Seuil, 2024), Alain Damasio partait justement à la rencontre de cette vision du futur imaginée par les géants de la Silicon Valley, entre voitures autonomes et robots servant du café. Et comme un appel au dépassement de cette vision contrainte, la semaine dernière, il invitait le public réuni à la Gaîté Lyrique à le rejoindre dans un atelier d’écriture en présence de DamasIA, son alter-IA. À noter que dans Le Monde, c’est la ville du futur qu’il tentait d’imaginer, notamment en évoquant le café (😉) comme « cet espace intemporel de liens, chaleureux et agréable, de rencontre possible, un nœud où les populations s’entrelacent naturellement. [...] Il faut juste que les corps soient dans un même espace, suffisamment rassurant, aéré et libre, et au même moment. » De quoi faire sauter tous les verrous, on ne pourra qu’abonder.
« Le récit fictionnel porte en lui un atout aussi simple que capital : il est accessible au plus grand nombre », observe Nicolas Gluzman, fondateur du collectif Futurs Proches dans Libération. Partant de la fiction, les participants aux ateliers d’écriture organisés par le collectif peuvent imaginer des mesures concrètes qui s’inscrivent dans le présent, allant des ceintures alimentaires bordant les villes à la mise en place de la semaine de quatre jours. Une libération de la parole par l’imaginaire également appelée par l’écrivaine Ketty Steward, qui anime des ateliers d’écriture à Noisy-le-Sec, lancés à l’initiative du département de Seine-Saint-Denis : « Imaginer à quoi pourrait ressembler un rendez-vous dans le service public du coin dans quelques années, c’est aussi faire de la science-fiction sans s’en rendre compte. » Mobiliser la société via la fiction, c’est enfin l’objet du tout récent rapport de l’Ademe « Mobiliser la société à travers le prisme de l'imaginaire. » Un travail de fond dirigé par Jules Colé qui explore les manières de mobiliser la société sur les enjeux de transitions à travers le prisme de l’imaginaire et de la mise en récit et qui vise à donner des clés d’actions à travers la diversité des dispositifs d’accompagnement pour imaginer les transitions écologiques et numériques.
Assurément, le partage de nos imaginaires, même sous les formes les plus simples, peut nous permettre de prendre du recul sur notre rapport aux outils numériques pour nous interroger collectivement sur la façon dont nous souhaitons ou non les développer ou les utiliser. Le détour par la fiction nous permet de nous détacher d’une vision de la technologie déterminée par une poignée de personnes qui enferment notre « à-venir » dans un futur à leur seule mesure. (Sur cette opposition « à-venir ouvert vs. futur fermé » issue de la pensée de Derrida, lire le Derridex ainsi que l’ouvrage de Anne Alombert écrit avec Gaël Giraud dans lequel nous l’avons découverte.)
Imaginaires ouverts pour technologies ouvertes. Depuis probablement trop longtemps, nous nous accommodons d’offres sur lesquelles nous n’avons que peu de prises. Nous réagissons à des projections centralisées qui relèvent souvent du gigantisme et n’avons pas (encore) les moyens de renverser les conceptions qui nous sont imposées. L’exemple des réseaux sociaux est intéressant. Le public peut certes les utiliser mais dans la limite de la vision qu’en a la plateforme, c’est-à-dire un service entièrement à sa main. Au Conseil, nous nous rendons bien compte qu’avant même de pouvoir défendre en termes de régulation la capacité de tout un chacun à configurer son réseau social, il y a une bataille des représentations à gagner : à la différence de la vision portée par les réseaux hégémoniques, un réseau social peut être décentralisé, à la main des utilisateurs, simple d’accès et enrichissant pour la démocratie. Et, oui, nous pouvons imaginer de très nombreuses fonctionnalités que l’enfermement narratif sur ce qu’est un réseau social ne permet pas de penser.
Cela ne doit pas occulter le fait que ces services peuvent, en l'état, avoir des avantages considérables, au contraire. C’est précisément parce que nous en sommes conscients que nous pensons pouvoir faire plus. Mais il importe pour cela d’impliquer le plus grand nombre, de construire une demande qui soit en retour capable de porter une offre satisfaisante. Par exemple, dans son édition du 22 octobre, la Nouvelle République partage le témoignage de deux déficients visuels pour qui l’IA offre de nombreuses possibilités de manœuvre : « ce n’est pas un outil initialement fait pour les personnes mal voyantes, mais cela nous aide beaucoup. » Ce qui invite à aller plus loin : à quoi ressemble un monde dans lequel la technologie est pensée pour répondre aux problèmes d’accessibilité ? Il ne s’agit pas d’être technosolutionniste. Il s’agit de dire que nos projections les plus heureuses doivent pouvoir guider le déploiement technologique. C’est peut-être là que se situera la voie du progrès. Et pour l’emprunter, nous avons tous un point de départ à portée de main : l’ouverture de la boîte de nos imaginaires.
Ouverture de nos imaginaires individuels donc mais pourquoi pas ouverture aussi à d’autres visions culturelles de nos lendemains. Les visions évoquées plus haut, largement diffusées par Elon Musk et d’autres acteurs de la Tech, remontent après tout aux fondateurs de la science-fiction américaine des années 1950 et 1960. Un héritage important, très plaisant parfois, mais que certains auteurs et autrices – comme Becky Chambers ou Kim Stanley Robinson, entre autres – pourront chercher à renouveler avec une vision plus porteuse d’espoir et plus responsable de la technologie. Une vision que les imaginaires indiens, asiatiques ou afro-américains peuvent également nous aider à compléter, comme le rappelait ici François Houste.
La fiction comme foyer de résistances. Rappelons enfin que les récits fictifs associés à la technologie ne sont pas plus neutres que la technologie. Ces récits nous permettent d’aborder la dimension politique des technologies et d’interroger à la fois le présent et l’avenir, mais ils le font - et c'est bien naturel - à travers les projections et les visions propres à leurs auteurs. L’enjeu est alors pour le lecteur de ne pas se laisser enfermer dans une représentation unique et inéluctable d’un futur technologique.
Comme de très nombreuses machines fictives, l’IA Samantha dans le film Her est un futur possible qui nous invite à le rendre impossible au présent. De la même manière, la société futuriste du film Wall-e nous invite à nous détourner d’une forme d’aliénation consumériste. Ou encore des robots tueurs qui se retournent contre leurs maîtres qui nous invitent à nous plonger dans ce fantasme incessant du dépassement de l’homme par sa propre création. Autant de récits, plaisants en tant qu'œuvres de fiction avant toute chose, qui se muent parfois en des aides à penser mais qui peuvent aussi avoir un impact réel sur notre perception de ce qui vient si l'on ne procède pas à leur dépassement.
Dans leur ouvrage collectif AI Narratives (Oxford University Press, 2024), Stephen Cave, Kanta Dihal et Sarah Dillon expliquent que « les narratifs des machines intelligentes importent parce qu’ils constituent la toile de fond contre laquelle les systèmes d’intelligence artificielle sont développés, et contre laquelle ces développements sont interprétés et évalués. » Ils ajoutent que « les narratifs peuvent fortement influencer l’acceptation et l’adoption des systèmes d’intelligence artificielle. » Le problème survient lorsque la société se laisse prendre dans une lecture univoque de ce qui vient. Par exemple, l’anthropomorphisation de l’IA, largement popularisée par les générateurs d’images artificielles, est une manifestation marquante de cette tendance. Pourtant, cela n’a rien à voir avec l’IA que nous utilisons au quotidien, celle qui est déjà présente dans nos poches, et sur laquelle nous devons porter un jugement éclairé. Comme le souligne Hubert Guillaud pour Dans les Algorithmes : « les images produites par l’IA sont la somme de toutes nos représentations qu’elles renforcent. » Et loin de se servir de ces projections pour interroger les voies possibles de notre avenir, les grandes entreprises de l’IA nous les présentent alors comme un « déjà-là » indépassable. Rappelons-nous que ce qui est écrit dans un livre ou dans un film ne l’est pas nécessairement pour l’avenir. Au contraire, il doit s’agir d’un point de départ pour penser autre chose au risque sinon de succomber à une forme de fatalisme irrémédiable.
Dans sa dernière chronique pour les Échos, Gilles Babinet partageait les résultats du baromètre IA de l’Ifop : 56% des français affirment que l’IA représente un risque pour l’emploi et la technologie inquiète 51% d’entre eux. A l’instar de Yannick Rumpula qui nous renvoie à Autofab de Philipp K. Dick (1955) comme illustration d’un futur du travail automatisé, il est intéressant d’observer que le mythe du remplacement de l’humain dans le monde du travail remonte loin dans l’histoire de la fiction, mais avec une perspective non fataliste et plutôt dénonciatrice au contraire d’un emballement économique : « Replacée dans le contexte de son époque, la nouvelle de Philip K. Dick paraît aussi métaphoriser un productivisme qui donnait déjà des signes qu’il allait devenir quasiment impossible à arrêter. Elle peut être lue comme la critique de l’emballement de la production de masse et d’un certain type d’abondance, montrant son caractère illusoire dès que le contexte change. »
Avec Café IA, nous souhaitons dérouler le fil de nos imaginaires, pour penser collectivement les technologies d’aujourd’hui comme de demain. Au cours de ces temps d’échange que sont les cafés IA, il est fréquent que les participants posent des questions, fassent part de leurs sentiments vis-à-vis de la technologie ou se projettent dans le temps, au conditionnel ou au futur. Cette parole brute, cette expression citoyenne, qu’elle soit ancrée dans le présent ou projetée dans le futur, dit beaucoup de notre relation à l’IA et à la technologie.
Comment les Français se représentent l’IA et son impact sur notre société ? Pour le découvrir, nous avons le plaisir de vous annoncer que nous lançons une collecte des imaginaires de l’IA en deux étapes !
Parmi les nombreux formats d’animation que Café IA souhaite soutenir et promouvoir, l’atelier d’écriture Mikrodystopies occupe une place particulière en ce qu’il permet justement de collecter des imaginaires autour de la technologie. Celles et ceux qui sont venus nous rendre visite lors des Journées Européennes du Patrimoine à Bercy en septembre dernier ou ont participé à nos derniers Cafés IA ont pu l’expérimenter. Depuis début octobre, nous proposons, en collaboration avec François Houste et l’agence Mon Oncle, l’animation d’ateliers d’écriture de Mikrodystopies autour de la thématique de l’intelligence artificielle. Lors de ces ateliers, chacun est invité à exprimer et partager ses imaginaires individuels et à inventer de courts récits dans lesquels l’IA chamboule, optimise ou perturbe notre quotidien. Ces récits sont le reflet de notre vision de l’intelligence artificielle et de l’impact qu’elle pourrait avoir sur nos vies dans le futur. Désormais, si vous souhaitez organiser votre propre atelier d’écriture de Mikrodystopies dans le cadre de vos cafés IA, le Conseil met à votre disposition un kit complet d’animation et une fiche pédagogique qui vous permettront de concevoir votre propre moment d’animation. Tout est accessible en ligne et nous restons disponibles dans le cadre de Café IA pour vous assister. N'hésitez pas à vous en saisir !
En complément de ces ateliers d’écriture, François Houste et l’agence Mon Oncle ouvrent aujourd’hui en lien avec le Conseil une seconde collecte des imaginaires : celle des imaginaires collectifs, et de la représentation de l’intelligence artificielle dans la culture pop au travers d’un bloc-notes collaboratif visant à recueillir vos propres références. Quels sont les films, animes, jeux vidéo ou bandes dessinées qui vous viennent en tête lorsque l’on évoque l’intelligence artificielle ? Quelles images, quelles histoires vous évoquent le développement récent des IA génératives ou les annonces d’Elon Musk quant au déploiement de ses robots humanoïdes ? Venez compléter la (déjà longue) liste d’imaginaires pop avec vos propres images et références. Le bloc-notes, hébergé sur Framapad, est ouvert à toutes les contributions et à toutes les idées ! Venez-vous exprimer !
En combinant vos imaginaires individuels – vos propres récits et Mikrodystopies – et collectifs – vos références pop – le Conseil national du numérique accompagné de François Houste tenteront de brosser, notamment en vue du sommet pour l’action sur l’IA de février 2025, un portrait de nos imaginaires. Un imaginaire certainement riche de diversité et que nous avons hâte d’explorer avec vous !
🗓️ Le 7 novembre de 13h30 à 15h, venez poser toutes vos questions à François Houste concernant les Mikrodystopies, le kit d'animation et la liste d'imaginaires pop dans le cadre d'un café animation ! Pour vous inscrire à cet échange en ligne, c'est ici.
LE REGARD DE… François Houste, directeur des créations chez Mon Oncle, à l’origine des Mikrodystopies
Depuis bientôt deux ans, l’intelligence artificielle est passée du quotidien des ingénieurs à la une des journaux. Experts, journalistes, influenceurs détaillent, sur tous nos écrans, la façon dont l’IA va tout chambouler : notre travail, nos loisirs, nos relations amoureuses et notre vie de famille… Mais dans l’esprit du grand public, c’est quoi exactement l’IA : une menace ou une opportunité ? Et comment imagine-t-on son impact sur notre quotidien ? L’une des méthodes pour le découvrir est de laisser libre cours à l’imagination de chacun via l’écriture de courtes histoires : les Mikrodystopies. Ces petits récits donnent à chacun l’occasion de partager ses angoisses ou fantasmes envers la technologie, en la mettant en scène dans sa vie de tous les jours. Chaque histoire, utopique ou dystopique, recueillie au cours des Cafés IA, devient l’une des pièces d’un imaginaire commun révélant la façon dont cette technologie bien particulière est perçue. Un autre prisme de lecture des transformations numériques de notre société.
Pour aller plus loin :
- Mercredi 16 octobre, Anne Alombert était à la Gaîté Lyrique pour le lancement de FUTU&R, la nouvelle formule du magazine Usbek & Rica. Elle était l’invitée de la soirée pour un échange sur la thématique du dossier central du numéro : comment protéger nos cerveaux ? Un numéro qui ne manque pas d’aborder, par exemple avec l’article d’Eric Senabre, l’impact de la science-fiction sur notre façon de concevoir l’avenir, entre télékinésie et télépathie.
- Retrouvez également la contribution d'Anne Alombert à l'ouvrage collectif Imaginaires technologies dirigé par François Sebbah et Alberto Romele et paru en novembre 2023 aux Presses du réel.
- Sci-fi in six words. Chaque mois depuis janvier 2020, le magazine Wired propose à ses lecteurs un thème lié de près ou de loin à internet, la science fiction, l’intelligence artificielle ou les extraterrestres. Les internautes inspirés peuvent alors soumettre une courte histoire de six mots liés au thème et être publié. La proposition gagnante voit à chaque fois son histoire illustrée par un artiste graphiste. Un format pas si éloigné des Mikrodystopies ! Petite sélection de celles qui nous ont inspiré :
Café IA, prix du mémoire…les actualités du Conseil !
AI Coffee - Gilles Babinet était l’invité d’honneur de la conférence annuelle de Digital Leaders à Londres. Son intervention s’est articulée autour de la coopération franco-britannique en matière d’IA avec un message clé : face aux acteurs dominants - aux premiers rangs desquels les États-Unis et la Chine - l’Europe doit trouver sa proposition différenciante, pourquoi pas en misant sur le déploiement d’une IA frugale et inclusive qui intègre les citoyens dès sa conception. L’occasion de présenter la démarche Café IA qui s’inspire, entre autres, de ce qu’avait mis en place Martha Lane Fox, qui avait alors milité activement pour l’inclusion numérique outre-manche. Un très grand merci pour l’invitation et la soirée d’échange.
Retour d’expériences Café IA. Dans le café animation de cette semaine, nous étions avec Vincent Mandinaud de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact). Il y a présenté un jeu sérieux - adapté de l’ETUI - encore en développement, visant à permettre la compréhension des enjeux relatifs aux systèmes d’intelligence artificielle dans le cadre professionnel et à outiller les acteurs pour conduire un dialogue social technologique. Parmi les sujets abordés lors des échanges : la multiplicité des outils d’IA et des acteurs confrontés à ces outils au travail, le besoin de développer dans tout milieu professionnel, et au-delà, un dialogue social autour de l’introduction de ces outils ou encore l’importance de trouver des moyens ludiques d’aborder notre rapport aux technologies. On se retrouve la semaine prochaine, toujours à 13h30 le jeudi en ligne, avec des animateurs et animatrices de Café IA : Juliette Fropier et Charline Meyer (ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires) et Florent Turchetta (médiateur numérique indépendant) pour un retour d’expérience, et le 7 novembre avec François Houste. Pour vous inscrire c’est ici.
Étudiantes, étudiants, c’est l’heure de postuler au prix du mémoire du Conseil national du numérique ! En juin dernier, nous vous annoncions ouvrir la 2e édition du prix du mémoire du Conseil, qui récompense une étudiante ou un étudiant de master 2 en sciences humaines et sociales, quelle que soit la discipline, contribuant à l’amélioration de la compréhension des enjeux numériques. Attribué par un jury composé de membres du Conseil et du secrétariat général ainsi que de personnalités extérieures, le prix comporte une dotation de 1 500 € et une valorisation des travaux de l’étudiant et de l’étudiante sous différentes formes. Étudiantes, étudiants, il ne vous reste désormais qu'un mois pour candidater et nous envoyer votre dossier avant le 31 octobre. Pour postuler, c’est par ici.
🔎 La veille du Conseil
« Seuls 2% des membres de conseil d'administration disent avoir les connaissances et l'expertise nécessaire pour superviser l'adoption de l'IA générative. » Cette semaine, CIO revient sur une enquête de Deloitte Global sur le rythme idéal d’adoption de l’IA en entreprise. Alors que 45% des 468 membres de conseils d’administration et de cadres supérieurs interrogés reconnaissent que l’intelligence artificielle n’a jamais été inscrite à leur ordre du jour, 3% seulement déclarent que leur organisation est tout à fait prête à intégrer l’IA dans leurs processus de recrutement. L’enquête souligne également le manque de connaissances en IA : plus des trois quarts des répondants (79 %) déclarent que leurs conseils d’administration ont des connaissances ou une expérience limitées, minimales ou inexistantes en matière d’IA. Un constat qui nous invite à ouvrir le dialogue sur les technologies au potentiel perturbateur telles que l’IA, comme le Conseil l’appelait dans les conclusions de l’ouvrage Travailler à l’heure du numérique. Corps et machines, dans la feuille de route transitions numériques au travail du Conseil national de la refondation numérique ainsi qu’à travers Café IA.
Compar:IA, le comparateur francophone de modèles d’IA conversationnelle développé par le ministère de la Culture et la Direction interministérielle du numérique (DINUM) est désormais disponible ! Cet outil intuitif permet d’émettre des requêtes sur deux agents conversationnels à la fois pour comparer leurs réponses, repérer leurs biais et relever trois défis essentiels : sensibiliser les citoyens à l’IA générative et ses enjeux ; veiller au respect de la diversité des cultures francophones dans les modèles d’IA conversationnelle et contribuer à la transparence des modèles d’IA générative. Le 12 septembre dernier, nous avons eu le plaisir d'accueillir Lucie Termignon et Aurélien Barot du service du Numérique du ministère de la Culture lors d’un café animation pour échanger et tester collectivement Compar:IA. En 3 étapes simples, l'outil permet, à partir de 11 modèles différents, d'identifier l'impact environnemental des requêtes, le degré d'ouverture des données du modèle, ou encore son historique. Compar:IA fait partie des nombreuses ressources d’animation à retrouver sur le site de Café IA !
Agents dopés à l’IA : assistants à notre service ou ubérisation au carré ? Cette semaine, Mistral AI a présenté ses Small Language Models (SLM) baptisés Ministraux : des modèles de langage fondés sur une architecture plus simple à maîtriser que celle des Large Language Models (LLM), comportant un plus petit nombre de paramètres plus adaptables à des environnements de travail locaux par exemple pour des applications critiques ou plus respectueuse de la vie privée. La question que relancent ces SLM est celle des « agents. » Cette stratégie n’est pas propre à Mistral AI mais se retrouve chez tous les grands acteurs de l’IA, comme en témoigne le premier papier d’Open AI sur le sujet ou les prises de position de Bill Gates, déjà relayées il y a près d’un an. Dans une chronique du Monde de la semaine passée, Alexandre Piquard donnait des exemples de ces systèmes d’IA qui se conçoivent comme de réels assistants augmentés connectés à d’autres logiciels ou applications et dont ils croiseraient les informations pour générer un résultat à l’utilisateur : « Pour les particuliers, ils pourraient en théorie servir à téléphoner au salon de coiffure pour fixer un rendez-vous, mettre à jour un calendrier en fonction d’e-mails reçus, planifier un voyage… Pour les entreprises, ils pourraient prendre des notes d’une réunion, puis mener des recherches complémentaires en ligne, envoyer des factures. » Mais cette agentification des IA soulève de nombreuses questions d’abord en termes environnementaux. Puis en termes de faisabilité technique, alors que les capacités de raisonnement ou encore de mémorisation de ces systèmes d’intelligence artificielle laissent à désirer. Et enfin, ces développements technologiques interrogent plus largement quant à l’intermédiation qu’ils pourraient engendrer, notamment dans les sphères économiques ou encore informationnelles. Dans un futur où nos actions sont médiées par ces agents, il importe de garantir que cette intermédiation ne recrée pas de goulots d’étranglement défavorables aux acteurs économiques et aux consommateurs. En début d’année, Jean Cattan alertait à ce sujet : « à voir la façon dont les choses se passent sur les IA génératives et l'accès aux médias, certains vont vendre un accès à leur ressources à d'autres qui auront les moyens de se les payer, et nous aurons une dépendance encore plus importante de notre économie aux mains de quelques grands groupes. Au final, nous n'aurons eu le choix de rien. » Pour lui, il faut donc définir collectivement les conditions de réalisation ou de non-réalisation de cette agentification pour éviter « de se laisser embarquer dans une ubérisation au carré sans poser nos conditions. »
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Cette lettre d’information a été préparée par Gabriel Ertlé et Joséphine Corcoral, illustrée par Magali Jacquemet et réalisée avec le soutien de Jean-Baptiste Manenti, Zora Decoust, Jean Cattan et de François Houste.